Connaître la ressource pour mieux la protéger

Actus

Depuis l’aire de « recharge » jusqu’à l’émergence, les hydrogéologues étudient la structure géologique et le fonctionnement naturel de l’hydrosystème. Des années d’observations sont nécessaires à la compréhension des processus qui donnent naissance à l’eau minérale naturelle evian. Ces connaissances sont fondamentales pour les gestionnaires et pour la protection de l’impluvium.

Depuis le milieu des années 1960, l’hydrosystème à l’origine de l’eau evian fait l’objet d’études menées par la Société des Eaux Minérales d’evian (SAEME). Les recherches visent à comprendre comment le milieu souterrain donne naissance à l’eau minérale naturelle, quelles sont les lois de circulation de l’eau au sein de la roche et d’où viennent ses composants naturels caractéristiques.

Mieux comprendre l’origine de l’eau et ses conditions de circulation pour mieux la protéger et garantir sa qualité et son renouvellement

Au quotidien, les sources sont exploitées de manière à ne pas prélever plus que ce que la nature est capable de renouveler, année après année, par infiltration d’eau de pluie ou de fonte de la neige.

Les programmes d’actions développés pour protéger la qualité de la ressource sont directement alimentés par les connaissances scientifiques.

Les experts s’appuient sur des données géologiques, des études hydrochimiques, des approches hydrodynamiques et isotopiques. Chaque année apporte son lot de nouvelles informations sur l’organisation géologique de l’aquifère, le débit des sources, le niveau des nappes.

Collaboration avec l’Université de Savoie

Cette collaboration a  permis de définir, avec une grande précision, la dynamique du glacier du Rhône à l’origine des roches au sein desquelles se forme l’eau minérale naturelle evian.

Des outils pour étudier la ressource

Les forages

La géologie du sous-sol de la région d’Évian-les-Bains est aujourd’hui bien connue grâce aux forages qui permettent des examens détaillés des dépôts glaciaires jusqu’à plusieurs centaines de mètres de profondeur. Depuis les années 60, plusieurs campagnes de sondages carottés ont permis de reconstituer la mise en place des sédiments lors de la dernière période glaciaire.

Les connaissances acquises sont complétées par des mesures dites « d’auscultation géophysique » qui précisent la nature du sous-sol jusqu’à plusieurs centaines de mètres de profondeur, à la manière d’une échographie.

L’hydrochimie

La minéralisation de l’eau est acquise au fur et à mesure de son trajet dans le sous-sol. La mesure des teneurs en minéraux dissous est révélatrice du trajet souterrain de l’eau. On observe ainsi des eaux moins minéralisées en magnésium et plus riches en bicarbonates à faible profondeur, que l’on interprète comme des eaux « jeunes ». A l’inverse, dans des zones très profondes de l’aquifère, les eaux « matures » sont plus riches en magnésium et silice. Les teneurs en magnésium et silice dissous traduisent une eau évoluée puisque ces éléments nécessitent des durées d’interaction longues entre l’eau et la roche.

Les isotopes de la molécule d’eau

Il existe dans la nature plusieurs formes ou isotopes de l’oxygène ; 16O et 18O sont les plus abondants. L’eau est constituée essentiellement à partir de l’isotope 16O, le plus répandu. La teneur isotopique des eaux de pluie varie en fonction de l’altitude. Il est donc possible de déterminer à quelle altitude une eau s’est infiltrée dans le sous-sol en comparant sa teneur isotopique à celle des eaux de pluies mesurées à différentes altitudes.

Les études isotopiques ont permis d’identifier une altitude moyenne de recharge comprise entre 800 et 1200 mètres d’Ouest en Est, ce qui désigne la zone du plateau de Gavot comme la zone de recharge du système evian.

Les approches hydrodynamiques

Le niveau des nappes d’eau souterraines peut varier sous l’effet de facteurs naturels (apport d’eau de pluie, fonte des neiges, variation de la pression atmosphérique …) ou sous l’effet d’un pompage. Dans tous les cas, ces variations sont révélatrices des caractéristiques hydrodynamiques du sous-sol (perméabilité, porosité, profondeur du niveau d’eau, etc.) et du fonctionnement de l’hydrosystème.

La datation par le carbone 14 (14C)

Cette méthode repose sur le cycle de vie d’un des isotopes du carbone : le carbone 14.

Le carbone 14 se transforme en gaz carbonique CO2 dans l’atmosphère. Sous cette forme, il est respiré par les matières vivantes (végétales et animales) et stocké tout au long de la vie. Après sa mort, le 14C disparait progressivement selon une loi mathématique connue. En mesurant la teneur en 14C d’un fossile, on peut grâce à cette loi calculer le temps écoulé depuis sa mort et son enfouissement.

Comme la tourbe est issue de la décomposition de matières végétales, elle peut être datée par cet méthode. Les datations 14C de la tourbe recueillie dans les carottes de forages renseignent sur les âges des différentes couches géologiques.

L’analyse des pollens et spores conservés dans la tourbe révèle l’histoire et la dynamique de la végétation, reflet des événements climatiques.

La modélisation

Les connaissances acquises depuis un demi-siècle sont agrégées au sein d’outils de modélisation. Ceux-ci permettent de reproduire sur ordinateur, à l’aide d’un modèle de calcul, les phénomènes physiques liés aux écoulements d’eau depuis la surface jusqu’au milieu souterrain. Ces outils intègrent les apports par les pluies, l’évapotranspiration, les débits des sources, les niveaux de nappe ainsi que des données sur la structure du milieu (géologie, occupation des sols, etc.). La qualité chimique des eaux est également prise en compte.

Ainsi, il est possible de simuler différents scénarios de gestion des ressources en eau et d’anticiper les éventuelles conséquences d’une évolution du climat.